En 2019, cultivons nos relations

« Mais alors,

n’a jamais

dit Alice,

parce que Lewis Carroll n’a jamais écrit cette réplique,

si le monde n’a aucun sens, qu’est-ce qui nous empêche d’en inventer un ? ».

Et oui, désolé de briser le mythe, mais comme beaucoup de citations qui tournent en boucle sur internet, celle-ci est apocryphe. Cela dit, la réplique est belle, et son succès en dit long sur l’état d’esprit général du moment.

Si vous êtes, comme moi en ce moment, en panne de certitudes, en voici toujours une : oui, ce monde est compliqué. Et s’il est si compliqué, c’est parce que nous, nous sommes compliqués.

Illustrations :

Au moment même où nous devrions faire face aux périls sans précédent qui s’accumulent, nous sommes nombreux à regarder ailleurs, préférant les « infox » aux faits, les théories complotistes les plus fumeuses aux analyses rigoureuses, les désinformateurs à ceux qui, parfois au péril de leur vie, ont pour mission de nous informer. Il est tellement plus facile d’accabler de reproches le messager que d’écouter ce qu’il a à dire. Surtout, bien sûr, si son message est dérangeant ou inconfortable…

Au même moment, alors que nous devrions faire front, unis et solidaires pour conjuguer nos efforts face à ces périls, nous sommes plus que jamais divisés. Et ceci non plus comme autrefois en blocs dont les centres de gravité oscillaient au grès des tendances démographiques et des mouvements d’opinions, mais désormais en myriades de fragments toujours plus petits. Chacun dans sa bulle…

Alors, tout naturellement, au lieu de rechercher sereinement les causes de nos maux, nous nous employons en permanence à rechercher des « coupables ». Et forcément, ceux-là, c’est toujours les autres, ceux qui sont différents. C’est bien pratique un bouc émissaire. Ça permet de se donner à bon compte un semblant d’unité. Et surtout, ça évite de trop se remettre en cause soi-même.

Mais tout ceci est humain. Tellement humain. Et un humain, ça se trompe, ça s’égare, ça se met en colère, ça a ses contradictions. Ça se cabre, ça se braque, ça a ses petites fiertés. Ça a ses faiblesses, mais aussi ses grandeurs. Ça a un cerveau, parfois reptilien, comme on dit, mais aussi un cœur. Et même si c’est buté, mal embouché, différent, pas pareil, rustre ou guindé, ça a une bouche, des oreilles et même un truc entre les deux pour qu’on essaie de se comprendre.

Alors il est peut-être temps – non, plus que temps en fait – de revenir aux fondamentaux. Car, pour nous en sortir dans ce monde compliqué, nous avons avant tout besoin de choses simples. Tellement simples que nous n’y pensons pas. Se supporter. Être polis les uns envers les autres. Être respectueux des croyances et des opinions des autres. Échanger des sourires, de petits saluts de la tête ou de la main. Oui, je sais, ça à l’air naïf dit comme ça. Mais s’il n’y a pas ça, il ne peut pas y avoir le reste. Le dialogue, la réconciliation, la reconstruction d’un socle commun pour avancer.

Car oui, ce monde est compliqué. Il n’en a pas fini, d’être compliqué. J’ai même la faiblesse de penser qu’il va l’être de plus en plus. Et plus ce monde sera compliqué, plus il aura besoin de gens simples, sincères, authentiques et, parce qu’ils seront tout cela, solides. Ces gens simples auront des valeurs simples : l’amitié, la fraternité, le respect, l’écoute et le partage. Ils seront capables de se retrouver sur des choses simples et, peut-être, enfin, de regarder ensemble dans la même direction.

Alors, pour conclure, il m’est récemment revenu à l’esprit que le mot « relation », ce mot si beau et si essentiel, avait deux sens, parfaitement complémentaires les uns des autres. Une relation, c’est bien sûr un lien, entre des personnes ou des groupes de personnes. On parle de ses relations ou encore de relations diplomatiques. En écologie, c’est un lien d’interdépendance entre plusieurs espèces d’un même milieu. Ces relations là, ce sont les liens qui nous unissent et nous dépassent. Mais une relation, c’est aussi un récit : le fait de relater une histoire ou un voyage. Et c’est précisément ce dont nous avons le plus besoin aujourd’hui : développer nos relations, consolider nos liens, et construire, collectivement, par l’écoute, le dialogue et l’action un nouveau récit pour avancer ensemble dans l’histoire. Et la relation de cette histoire-là, ô boucle vertueuse, nous aidera à reconstruire nos liens.

Alors, en 2019, cultivons nos relations. En toute simplicité.

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